1. Regard historique

Un territoire pôlarisé

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Timeline

À travers une enquête historique sur les trois communes de Champagne-sur-Seine, Moret et Thomery, nous avons d’abord cherché à comprendre les différentes époques qui ont façonné la ville.
Du Moyen-âge jusqu’au XVIIe siècle : Champagne est une ville viticole, dominée par Thomery, centre important pour la culture du chasselas qui alimentait les rois de Fontainebleau.
La révolution Industrielle, deuxième moitié du XIXe siècle: le transport se développe sur le territoire, deux lignes de chemin de fer, de chaque côté de la Seine, sont construites. Vingtième siècle, ère industrielle: le site accueille les usines Schneider, qui font passer la ville de 700 habitants à plus de 1 500 en trois ans, puis plus de 6000 au plus fort de leur activité dans les années 1950.
Epoque contemporaine, depuis 1980 : L'usine devenue Jeumont-Electric ferme et provoque le déclin progressif de Champagne-sur-Seine. Peu à peu, les parcelles de l'ETIC (Espace Technique et Industriel de Champagne), sont vendues à bas prix en suivant une logique spéculative.
Dans une recherche plus exhaustive sur la ville de Champagne, on peut répartir ces événements en cinq catégories : la géographie et l'environnement, la démographie, les infrastructures et voies de transport, les événements politiques, les événements économiques. Ces événements varient selon leur zone d'influence, ils peuvent être extérieurs d'influence locale, comme par exemple le phylloxéra qui a achevé les cultures viticoles de Thomery dans les années 1960, ou au contraire intérieurs d'influence régionale, comme le Sucre d'Orge de l'abbaye de Moret, devenu spécialité locale.

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2. Dynamique politique locale

Une intégration par palliers conduisant à un équilibre discutable

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La communauté de communes dont fait partie Champagne-sur-Seine a une histoire particulière. En effet, dès 1970 la commune de Moret-sur-Loing, le Syndicat à Vocations Multiples est créé pour gérer le ramassage des ordures ménagères. C'est une première forme de mutualisation. Il regroupe sept communes autour de Moret-sur-Loing. En 2001, ce syndicat devient district, avec pour objectif la réali­sation d’une piscine, d’un collège et d’une caserne des pompiers. Un an plus tard, Vernou-La-Celle-sur-Seine et Ville Saint-Jacques adhèrent au district.
La Communauté de Communes de Moret Seine & Loing (CCMSL) remplace en 2002 le district. Thomery et Veneux-Les-Sablons. Ce n'est qu'en 2003 que Champagne-sur-Seine rejoint la CCMSL. La communauté de communes s'étend ensuite au Sud, avec l'adhésion de Montigny-sur-Loing en 2009, puis huit autres communes en 2010. Dormelles est la dernière commune à rejoindre la CCMSL en 2012.
La commune éponyme cherche à s'étendre également ; d'abord Moret-sur-Loing puis Orvanne, en regroupant Moret à la commune voisine d'Écuelles, la commune nouvelle de Moret Loing et Orvanne existe depuis 2016, regroupant Ecuelles, Episy, Montarlot et Moret-sur-Loing.
Il y a derrière ces manœuvres une volonté pour la commune de Moret de dépasser le poids de Champagne-sur-Seine. En effet, Champagne-sur-Seine était jusqu'à présent la première commune de la CCMSL, avec huit élus. La nouvelle commune de Moret Loing et Orvanne fait basculer Moret de cinq à dix élus.
L'activité économique est au cœur des rivalités entre Champagne et Moret. La zone d'Activités de Renardières, à Moret, entre en concurrence avec l'ETIC. Les enquêtes auprès des habitants concernant leur perception du territoire intercommunal nous indiquent que cette opposition reste vraie pour eux : il y a « ceux de Moret » qui montreraient du dédain pour les Champenois, et la ville « sinistrée » de Champagne, de laquelle on s'enfuit pour ne pas y revenir. Au sein de Champagne même, le principal problème semble avoir été la dissolution du lien social depuis la fermeture des usines. Une grande partie des Champenois est tributaire du transport quotidien à Paris.

3. Que nous disent les chiffres ?

Quelques données économiques et sociales sur les communes de Thomery, Champagne et Moret

Qu'en pensent les habitants ?

La ville souffre de la disparition de son organe économique et social vital depuis la fermeture des usines Jeumont-Schneider et cette image de déperdition est très forte chez ses habitants. La situation économique est difficile car suite à la constitution de la CCMSL, un jeu politique complexe bloque les volontés de réaménagement de l’ETIC, zone industrielle qui occupe environ un quart du territoire communal et aujourd’hui en partie propriété de la communauté de communes. Les multiples propriétaires de l'ETIC, attirés par un foncier attractif, sont des entreprises fragiles en renouvellement permanent.
Les champenois souffrent d’une politique culturelle assez réduite ; quelques associations existent, les mêmes événements se répètent d'une année sur l'autre. Mais c’est surtout le lien social qui semble manquer aux habitants : sont toujours soulignées les différences de groupes sociaux dont l’action ou l’inaction nuirait aux autres, ainsi que le manque de communication de la municipalité sur ses actions.
À l’échelle de la ville, on constate que l’ETIC crée une fracture dans le territoire, fragmentant spatialement les différents quartiers de Champagne et bloquant de possibles trames entre la ville et ses voisines Saint-Mammès et Veneux-les-Sablons.
Isolée politiquement, Champagne l’est aussi spatialement donc, à la fois par sa propre structure et par les deux grandes limites que constituent la Seine et la voie de chemin de fer à l’est. Il nous paraît dès lors judicieux de s’orienter vers un programme de perméabilisation de l’ETIC depuis le centre vers le sud, et pourquoi pas d’envisager de nouvelles jonctions avec le territoire, afin de relier la ville aux autres communes de la CCMSL plus directement.

4. Un vrai potentiel naturel

Les espaces publics principaux de Champagne-sur-Seine sont actuellement marqués par certaines incohérences de connectivité et de lisibilité entre eux. S’ils sont laissés à l’abandon pour longtemps, ces espaces peuvent saper encore plus la vitalité de la ville.
La zone la plus fréquentée par les Champenois et les touristes est la berge de la Seine. C’est la zone d’étude prioritaire de la ville.
Actuellement, du nord au sud (ou d’aval en amont), la berge de Champagne offre des paysages urbains animés et diversifiés, et permet de s’ouvrir sur des programmes variés pour les touristes et visiteurs. Cet emplacement permet de profiter du coucher de soleil à l’ouest, et de la sécurité pour les cyclistes en famille et les femmes seules. La piste passe par les points de repère suivants :
- L’église Notre-Dame de L’Assomption et le cimetière avoisinant
- Le lycée La Fayette et son centre sportif adjacent
- L’écluse (qui a un potentiel didactique sur certaines dynamiques de la Seine), point de connexion entre Champagne et Thomery
- L’ancienne maison de l’éclusier, portant la marque de la crue de 1910
- La place Bernard de Villèle, arborée de platanes en quadrillage, devant le pavillonnaire du début du XX siècle
- L’usine historique de Schneider Electrics
- La richesse paysagère de l’Espace naturel sensible (ENS) de 11 ha, une zone de superficie importante, parmi les 22 ENS de Seine-et-Marne. Son réaménagement est prévu pour des loisirs et des jardins familiaux.
Malgré cette série paysagère variée, il y a de nombreux lieux inadéquats qui nécessitent des études sur un meilleur usage de l’espace pour les habitants.
Pour commencer, l’actuelle piste pour se promener n’est pas idéalement adaptée pour le flux des usagers variés – la rue Quai de la Seine est partagée entre les voitures privées et de service, les joggers, les cyclistes, les promeneurs jeunes ou âgés. Le trottoir au niveau de la rue est absent par endroits. Le quai semble désormais insuffisant pour les piétons, avec notamment la croissance d’activités comme la pêche. Comme pour d’autres espaces publics de Champagne, le quai donne la priorité à la circulation routière, avec en particulier le stationnement de Voies Navigables de France devant le fleuve.
Étant donnée l’existence de constructions patrimoniales au bord de la Seine, il est préférable de donner aux voitures la priorité de la rue, et de créer une piste parallèle plus sûre pour les non-conducteurs, le quai en contrebas de la route.
Le revêtement le long du quai est inégal ; sa surface est inadéquate et parfois non revêtue. La largeur est souvent insuffisante pour une double voie de cyclistes. Certaines pistes et escaliers se terminent parfois dans la boue. Elles sont parfois réduites à 60 cm de large, un espace insuffisant même pour une unique voie piétonne.
La zone s’étendant de l’église jusqu’à la limite sud-ouest de l'ETIC est sujette à une étude pour un réaménagement écologique. Cependant, la grande proximité avec l’écluse et les activités humaines rendent difficile une réelle valeur écologique.
En tout état de cause, cette section s’ouvre à une activité croissante de la pêche. Depuis l’installation des centres d’épuration, la qualité de l’eau s’améliore et donne lieu à une pêche plus productive aujourd’hui qu’il y a cinq ans.
Tous ces espaces s’implantent dans des espaces ouverts. Il existe un fort potentiel pour mieux profiter des multiples couloirs de vue, une occasion parfaite pour mieux comprendre la région et son historique.

5. La Scandibérique, quand les cyclotouristes transforment la ville

Des enjeux européens à Champagne sur Seine

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Se développe aujourd'hui en France un important réseau de véloroutes et voies vertes issues d'une concertation européenne pour la valorisation du vélo comme moyen de transport écologique et vecteur de tourisme éco-responsable. La création d'une commission interministérielle a donc été suivie d'une politique de subventions pour les projets d'aménagements de voies cyclables et équipements associés de la part des communes et intercommunalités. A ce titre les régions et départements disposent d'une enveloppe importante dédiée.
L'Eurovéloroute 3 « Scandibérique », en phase d'aménagement, passe par les berges de Seine et du canal du Loing en plein cœur de la CCMSL, et notamment par Champagne-sur-Seine et Moret-sur-Loing. Cette situation nous paraît propice à encourager une coopération politique locale à travers les aménagements découlant de l'installation de l'Eurovéloroute.
Toutefois, le tracé de cette véloroute est assez monotone, et se détourne des points d'intérêts de l'intercommunalité : le centre de Moret, une commune de caractère, ainsi que l'ETIC, où plusieurs bâtiments sont classés remarquables.

6. Une stratégie transversale

Valoriser les liens sociaux et territoriaux

Devant l'inégalité du territoire de Champagne-sur-Seine et les communes voisines, nous souhaitons, autour de l'Etic, zone industrielle en déclin, accentuer les liens entre les communes par le vélo. L'intercommunalité est globalement favorisée et accueille l'Eurovéloroute. Nous souhaitons tirer parti de ce projet de grande échelle pour faciliter les transports des habitants des trois communes en circulation douce et ainsi modifier le rapport que les habitants entretiennent avec leur territoire.
La Scandibérique est déjà presque aménagée sur le tronçon de la CCMSL, mais un aménagement de voies secondaires est possible, permettant aux cyclotouristes des alternatives intéressantes, et offrant surtout aux habitants un réseau de circulation douce permettant d'appréhender leur territoire à une échelle intercommunale. La plupart des équipements est à une distance inférieure à 20 minutes de vélo. Enfin, l’ETIC, au coeur du dispositif, pourra être ouverte de la ville à la Seine, donnant à Champagne une nouvelle perméabilité.

Pour un urbanisme de partenariats

L'ETIC et ses environs Promenade sur le quai L'ETIC comme gisement Franchir la Seine Cycl'ETIC Réaménagement d'un espace public et sportif

La méthode d’intervention choisie est une alternative aux projets d’urbanisme traditionnels. Ceux ci résultent trop souvent d’un perception partielle ne prenant en compte que les flux physiques comme si eux seuls définissaient la ville et ses dynamiques. En résulte en général de coûteux aménagements urbains ayant un effet limité et localisé sur la vie des usagers. Ceux-ci peuvent avoir un impact immédiat, sont visibles et s’inscrivent sur du court terme électoral. Néanmoins ces interventions se limitent au tissu urbain.
L’urbanisme de partenariats agit sur les dynamiques sociales en mettant en relation des acteurs qui vont ensemble générer la ville. C’est une action qui démarre en plusieurs foyers stratégiques pour ensuite s’étendre à la ville puis sa région au cours du temps. De plus le fait de stimuler des acteurs (plutôt que se contenter d’aménagements construits) va avoir pour effet de rendre la dynamique autonome. Chaque acteur trouvant des intérêts à l’entretenir et la développer. On passe d’un système pyramidal pesant et coûteux à une dynamique horizontale auto-stimulée, évoluant et s’adaptant en permanence.
Nous proposons d’appliquer cette méthode à Champagne en tirant profit de la zone Etic aujourd’hui en déshérence et de l’arrivée du projet européen de l’Eurovéloroute.
Champagne a la particularité de compter environ 30% de chômeurs dans sa population, ce qui peut être un atout sous forme de main d’oeuvre stimulable dans notre cas, notamment dans le cadre d’un projet de réemploi des matériaux issus d’une déconstruction sélective des bâtiments sous-utilisés non-patrimoniaux disséminés sur la zone (projet B2).

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